Macbeth de Laurent Pelly : rien de nouveau…

Mac Beth Pelly1

Quel contraste il y a parfois entre les notes d’intention d’un metteur en scène et la réalité de sa production…

Je suis allée voir Macbeth de Laurent Pelly au théâtre des Amandiers… Je connaissais surtout Laurent Pelly grâce à l’opéra. J’avais vu Platée, par exemple, très drôle et fourmillante de bonnes idées, même si la pièce en elle-même n’était pas révolutionnaire… Laurent Pelly semble, ici, chercher davantage de sobriété, mais il perd en même temps ce qui pouvait éventuellement faire naître le plaisir chez le spectateur : la richesse de ses trouvailles.

Rien de nouveau, donc, dans cette mise en scène. Elle semble entièrement faite du magma de tout ce qu’on a déjà plus ou moins vu au théâtre. Le décor représente un labyrinthe de murs uniformes, le roi a une belle couronne, les costumes, sans faire référence à une époque précise, font songer aux vêtements portés dans les années 1940, les sorcières sont on ne peut plus cliché avec leurs chapeaux pointus et leurs voix désaccordées.

Les comédiens, surtout, sont décevants. La diction de Thierry Hancisse, qui joue le rôle de Macbeth, est aussi grandiloquente qu’à l’accoutumée. Je l’ai vu, il y a quelques années, dans Tête d’or de Claudel : trois heures de déclamation emphatique dans la pure tradition du Français… Son jeu n’a pas changé. Il est dans l’excès permanent. Sa douleur est risible et il rit, régulièrement et sans raison, comme pour montrer qu’il sait bien le faire et qu’il a une belle voix grave. Le personnage de Macbeth, si complexe, si fragile et si sanguinaire à la fois, perd toute sa profondeur : il n’est plus qu’un comédien qui gueule sur une scène de théâtre. Il n’a plus d’humanité, plus d’intériorité, plus de silence – car c’est peut-être, au fond, le silence qui fait l’homme au théâtre… Les voix des personnages surnaturels, déformées, exagérées, amplifiées par un écho inapproprié, sont inaudibles. Lorsque Macbeth revient voir les sorcières et demande à en savoir davantage sur son avenir, un marionnettiste surgit au milieu d’une fumée verdâtre et tout en manipulant – mal – un petit squelette, prononce ses oracles. L’écho artificiel qui cherche à donner à sa voix un éclat d’outre-tombe rend ses propos – pourtant essentiels – incompréhensibles.

Une scène seulement m’a plu. Celle où Macbeth reçoit les nobles de sa cour et voit, au milieu d’eux, le spectre de Banquo, qu’il vient de faire assassiner. La lumière change habilement pour montrer le contraste entre la scène telle qu’elle est vécue par les convives, et celle, glaçante, que perçoit Macbeth. L’inventivité en revient néanmoins à la formidable écriture de Shakespeare, qui avait conçu toute cette scène sur la discordance des points de vue. Bien maîtrisée dans ce passage, la mise en scène de Laurent Pelly ne nous apprend rien, ailleurs, sur la pièce, et surtout ne fait rien percevoir – malgré ce qu’il peut en dire dans ses interviews – de son extrême modernité : Macbeth est une tragédie intérieure. Les ennemis ne sont finalement pas tant ceux qui avancent cachés derrière les branches du bois de Birnam que les angoisses lovées au plus profond de l’esprit des personnages. Macbeth et sa femme vont à leur perte, pauvres somnambules, poussés qu’ils sont par l’ambition, la terreur et les soubresauts de leur inconscient.

Macbeth de William Shakespeare.

Mise en scène : Laurent Pelly.

Représentation du vendredi 13 septembre 2013 au théâtre Nanterre-Amandiers.

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